Groupe des « Amis de La Vie » de Lyon
Compte rendu de la rencontre du lundi 2 décembre 2013
Nous nous retrouvons plus de 30 personnes ce lundi soir avec Dominique Fonlupt, rédactrice en chef adjointe à LaVie, Franck Gacogne, curé de la paroisse St Benoît de Bron et Nathalie et Christian Mignonat.
Au journal, Dominique est chargée des relations avec les lecteurs et elle anime le réseau des « Amis de La Vie ». Lors des EGC (Etats généraux du christianisme », cette année à Lyon, Dominique ne s’est pas occupée du programme mais elle nous dit combien le travail des groupes locaux est important. « On ne peut pas s’en passer » dit-elle et elle remercie chaleureusement tout le groupe pour le travail accompli lors des EGC.
Nous sommes heureux d’accueillir Franck Gacogne qui vient nous donner son témoignage. Il est prêtre depuis 11 ans et a la charge de la paroisse St Benoît de Bron pour la 3ième année. Suite à la situation d’une personne (mariée à un divorcé) qui n’a pu accéder au catéchuménat pour préparer la confirmation, Franck a écrit une lettre : « Un prêtre crie, son Eglise entend ? » en mars dernier et il l’a envoyée à La Vie. Sa lettre est restée sans réponse et Franck a contacté le groupe des « Amis de La Vie » de Lyon. Actuellement la lettre est sur le site de « La Vie » ; chacun l’a reçu avec l’invitation à notre rencontre de ce soir.
Franck nous dit qu’il est venu nous livrer des convictions mais aussi des questions et des interrogations. Il nous dit : « Chacun de nous peut contribuer à ce que notre Eglise, celle du Christ, lui soit toujours plus fidèle » et il nous invite à nous exprimer de façon constructive.
« J’ai tout reçu de l’Eglise à commencer par la foi et je voudrais signifier ce qui dans la parole officielle de l’Eglise ne me semble pas ajusté au Christ auquel je crois. Je ne connais pas une famille non concernée par une situation de divorce mais il n’y a pas de divorce banal. Il y a eu un engagement, des projets, des enfants ; le divorce est toujours source de souffrances, d’espoirs déçus et d’avenir incertain. Les personnes qui désirent me rencontrer pour parler de leur situation sont profondément chrétiennes et vivent authentiquement leur baptême. Elles ont l’impression qu’à la douleur de leur premier échec, se surajoute une autre douleur, leur place dans l’Eglise. Ont-ils le droit de retrouver le bonheur avec quelqu’un d’autre ? Dans une nouvelle union ils tâtonnent entre conscience personnelle, regard des autres et fidélité à l’engagement premier… Quelle place pour eux dans l’Eglise ? Mais la situation la plus difficile est celle de ceux qui découvrent ou redécouvrent la foi à l’âge adulte alors qu’ils vivent fidèlement leur vie de couple mais il se trouve que pour l’un ou l’autre cette union est la seconde après un mariage sacramentel.
Comme curé, je considère qu’il est dans mon rôle d’accueillir les personnes qui viennent m’exposer leur situation. Quand elles m’interrogent sur leur possibilité d’accéder à la communion, je les invite à un chemin de réflexion et de relecture de leur vie pour au bout du compte une décision en conscience qu’elles prendront.
Mais dans le cas des catéchumènes la demande de sacrement est faite auprès de l’évêque par le biais du catéchuménat et au final l’appel est décidé par l’évêque. Il y a des catéchumènes qui sont arrêtés dans leur chemin vers un sacrement parce que les conditions qui leur sont signifiées (par exemple, s’engager à faire une démarche de nullité de mariage) sont insurmontables. Donc ce qui devrait être la plus grande joie pour une paroisse, pour un pasteur, devient ma plus grande appréhension et je me sens dépossédé de la démarche d’un adulte de ma paroisse qui demande à cheminer dans la foi vers le baptême ou la confirmation.
Pour moi la mission de l’Eglise est : « avoir des paroles et des gestes, qui disent la fidélité au Christ et à l’évangile, pour le monde de ce temps. »
Puis Franck nous invite à regarder Jésus dans l’évangile ; Jésus ne change pas un iota de la loi,(Mt 5,18) ne remet pas en cause l’indissolubilité du mariage (Mt 19, 1-9) mais répète : « Je ne suis pas venu abolir la loi mais l’accomplir » (Mt 5,17). « La loi, ce sont des paroles de vie que Jésus rappelle pour une vie plus accomplie et plus fidèle ; elle est au service de l’homme dans sa quête de plus d’humanité et de divin dans sa vie ». Puis Franck évoque avec nous les rencontres de Jésus dans l’évangile. « Dans les rencontres, Jésus se met à la hauteur, entre dans l’espace de vie de la personne qu’il rencontre, entre en conversation, permet à celles et ceux qu’il rencontre de faire un pas vers « le bien qui est possible » et l’idéal visé que Jésus défend.
Jésus se réjouit des rencontres qu’il fait avec ces personnes que la loi lui interdisait de fréquenter et met à l’avant leur foi. Jésus s’intéresse spécialement aux malades et aux pécheurs, précisément ceux qui ne vivent pas cette loi. Il vient leur donner sa vie et la leur donner en abondance. « Je ne suis pas venu pour juger le monde mais pour le sauver (Jn 12, 47). Jésus manifeste toute la miséricorde de Dieu et permet de se redresser. Pourquoi aujourd’hui dans notre Eglise vouloir plaquer cette loi sur toutes les situations sans différenciation ? Tout le monde est mis dans le même sac étiqueté «divorcés-remariés». La vérité aujourd’hui est que tous dans l’Eglise sans différenciation, subissent la même double peine : la première, celle de ne pouvoir se remarier, et la seconde plus grave sans doute, celle d’être exclu à vie de tous les sacrements ». Franck termine son intervention par un propos du pape François dans son exhortation apostolique récente Evengelii Gaudium :
« Saint Thomas d’Aquin soulignait que les préceptes donnés par le Christ et par les Apôtres au Peuple de Dieu « sont très peu nombreux » (citant saint Augustin), il notait qu’on doit exiger avec modération les préceptes ajoutés par l’Eglise postérieurement « pour ne pas alourdir la vie aux fidèles » et transformer notre religion en un esclavage, quand « la miséricorde de Dieu a voulu qu’elle fût libre ». Et le pape ajoute : « Cet avertissement, fait il y a plusieurs siècles, a une terrible actualité. Il devrait être un des critères à considérer au moment de penser une réforme de l’Eglise et de sa prédication qui permette réellement de parvenir à tous » (N°43)
Puis nous donnons la parole à Christian et Nathalie Mignonat qui se présentent : Ils viennent des Equipes Notre Dame et font de la préparation au mariage en paroisse. Ils accompagnent une équipe Reliance, équipe qui accueille des chrétiens vivants une nouvelle union après un divorce. Ils accompagnent aussi des personnes qui souhaitent vivre un temps de prière à l’occasion d’un 2ème mariage civil au sein de l’association SEDIRE. Christian est « défenseur du lien » à l’officialité.
« Nos engagements touchent aux couples et aux problèmes rencontrés dans leurs vies.
Nous voyons dans les divorces 4 étapes qu’il est important de distinguer :
-la période de la rupture, souvent très dure pour une personne ou les deux, période que l’Eglise devrait accompagner humainement.
-la période de la reconstruction, plus ou moins longue ; comment faire face à la solitude, à cette nouvelle vie ? Des groupes comme « Revivre » et « Chrétiens divorcés, chemin d’espérance » sont particulièrement présents à cette période.
-Quand elles sont reconstruites certaines personnes vivent une nouvelle rencontre et sont face à un discernement humain difficile et un discernement de la relation à l’Eglise.
-Quand la décision est prise, on rentre alors dans le statut de « divorcé-remarié » et il faut faire face à l’attitude de certains chrétiens, de certains pasteurs et la discipline de l’Eglise s’applique. C’est là que se situent les équipes Reliance ».
Puis nous laissons la parole à tous les présents :
Une personne dit : «On peut communier si personne ne nous connaît car les raisons sont celles du scandale ».
Christian précise alors le droit canon de 1983 : « Ne peuvent participer à l’eucharistie, les personnes qui subsistent dans un péché grave, ce qui a été interprété comme applicable aux divorcés remariés ». Les pasteurs sont coincés et ne peuvent pas donner l’absolution. La situation d’un(e) célibataire qui épouse un(e) divorcé(e) et qui est alors privé(e) de sacrements semble injuste. (surtout que ce n’est pas une punition mais la conséquence d’un état de vie « objectif »).
Souvent les gens parlent de leur situation ainsi car ils la vivent avec culpabilité. Comment se dépouiller de cette culpabilité ? A la messe, avant la communion nous disons : « Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir… » ; nous pouvons tous nous poser la question « De quoi sommes nous dignes ? quelle que soit notre situation conjugale.
Des questions à Christian sur la nullité. « Je suis le défenseur du lien (défendre la dignité du mariage) pour savoir si les conditions au moment du consentement étaient valides pour un mariage chrétien sacramentel ; quelle était la maturité ? » Des personnes se sentent libérées par cette démarche mais il y aurait détournement de l’objet et du but si c’était pour obtenir l’accès aux sacrements. Beaucoup de demandes sont acceptées car on procède à une évaluation préalable de la pertinence de la demande. Ainsi la tendance est assez libérale.
Une personne exprime sa souffrance face à ce tribunal. Combien de personnes restent en souffrance ?
Les personnes que nous accompagnons dans Reliance ne sont pas contre l’indissolubilité mais quel en est le sens aujourd’hui ? Les personnes ne demandent pas un 2ème mariage sacramentel mais demandent de vivre en Eglise. Compte tenu des différences culturelles, il n’est pas possible d’avoir une réponse universelle mais chaque évêque peut accorder ou non une dispense face à une situation particulière qui lui est exposée.
On semble souvent être dans le juridique :
Pour deux personnes non baptisées, leur mariage civil est pris en compte (il est valide) et elles ne peuvent avoir un 2ème mariage à l’église. Pour deux personnes baptisées qui se marient civilement la 1ère fois, leur mariage est invalide et un 2ème mariage peut être célébré à l’église. Tout ceci semble incompréhensible ..
Puis nous évoquons l’attitude des orthodoxes qui admettent un 2ème mariage possible avec une démarche pénitentielle forte. Au 1er mariage il y a consentement et couronnement et; au 2ème mariage seulement consentement.
Actuellement on peut participer à la préparation du synode sur la famille qui aura lieu en octobre 2014 : Rome a mis un questionnaire en ligne auquel chacun est invité à répondre ; les réponses sont à envoyer pour le diocèse de Lyon avant le 20 décembre ; cela nous semble bien court pour réagir en groupe mais nous décidons pour ceux qui le peuvent de se retrouver le mercredi 18 décembre à 20h au 13, rue St Maurice pour faire une réponse de groupe à ce questionnaire.
Jean Philippe nous parle ensuite de ce qui a été vécu lors de la journée sur « Désir d’enfant » le samedi 30/11. Une centaine de personnes y ont participé et les six interventions ont été de grande qualité avec dans l’ordre : une psychanalyste, un philosophe, une biologiste, un sociologue, une juriste et une théologienne. Le temps de travail en groupe et les questions réponses ont permis à chacun d’approfondir leur réflexion.
Nous rappelons ensuite à tous le week-end sur : « L’eau, un bien commun à protéger » qui aura lieu les 25 et 26 janvier à Belley (01). Chacun est invité à y participer et à proposer ses services. Des tracts de pub sont envoyés à chacun.
Nous terminons la soirée par la lecture d’un texte « Croire malgré tout », texte écrit par un prêtre pour une célébration avec des personnes divorcées ou divorcées remariées. (en pièce jointe)
Après cette soirée riche en échanges nous partageons nos pique-niques.
Préparez bien tous ces temps de fête et vivez les au mieux.
Cordialement à tous et toutes.
Madeleine
P.S. : pour accéder au questionnaire sur la famille pour le synode, utilisez ce lien :